Young Rebellion [PV STEPHEN]

Je marchais en ville, écouteurs dans les oreilles, le portable en main. Il faisait beau, et ma capacité de concentration était sous le tapis, du coup je m'étais dis que sécher les cours, ça pourrait s'avérer être une excellente idée. J'étais justement en train de texter mon meilleur ami pour l'avertir que je ne serais pas là pour ma clope habituelle derrière le lycée, entre les deux cours de l'après-midi.
C'est d'ailleurs grâce à lui que j'avais découvert cette sortie de secours jamais utilisée, qui m'avais permis de sortir du bahut sans me faire avertir. Je devrais penser à le remercier pour cette évasion de ninja.

Ma musique était au max dans mes écouteurs, bloquant les bruits environnants, me forçant à être dans mon petit monde. L'une des chansons au rythme endiablé de System of a Down m'empêche d'entendre le taxi qui se stationne sur le bord du trottoir. Je ne prend même pas la peine de relever la tête, en train de lire les SMS de mon meilleur ami, qui, vraisemblablement, à décidé de sécher les cours aussi.

Je continuais à marcher, toujours les yeux rivés sur mon portable; à croire que ma vision périphérique était géniale, puisque je n'avais foncé dans rien ni personne. Pourtant, une main se posant sur mon épaule me fait sursauter et j'enlève rapidement mes écouteurs, me retournant avec un visage surpris. J'hausse les sourcils encore plus quand je réalise que c'est mon père, parce que sincèrement, je ne m'attendais pas à le voir ici. « Papa? » Que je lui demande, comme si ce n'était pas déjà assez logique. Une fois la surprise passée, je range mes écouteurs et mon portable dans mes poches. « Et toi t'es pas censé être... Euh... Ailleurs? » Que je lui demande un peu trop sarcastiquement, en arquant un sourcil, posant mes mains sur mes hanches. Il à l'air encore pas mal amoché. « T'es arrivé ici comment? T'as pas marché, j'espère? Au moins t'as pas pris la voiture. » J'essaie de changer de sujet pour éviter de lui mentir et de me faire prendre en plein délit de séchage de cours. Mon père pouvait sentir à des miles à la rond mes mensonges; l'avantage avec maman, c'est qu'elle ne repérait pas ça immédiatement, du coup ça me laissait le temps d'agir. Avec lui, c'était une autre histoire.

J'hoche la tête à sa réponse. Il semble avoir compris ma volonté de changer de sujet et il ne me pose pas d'autres questions concernant la raison de ma présence ici au lieu d'être en cours. Je suis soulagée, mais ne laisse rien paraître. « Oui, je comptais rentrer. Maddox est occupé, du coup j'ai rien de mieux à faire... » Je savais que mentionner mon meilleur ami pourrait attirer son attention; dans un sens, ça ne faisait que donner de la crédibilité à notre relation, mais en même temps, je savais que mon père ne l'appréciait pas beaucoup. Personne n'appréciait Maddox sauf moi et ses potes drogués. C'était signe de sa réputation de merde, mais moi, je n'en avait que faire. Il était quand même très gentil.
Je tend la main à mon père, un petit sourire en coin étirant les commissures de mes lèvres. « Aller, l'éclopé, tu rentres avec moi ou tu prend un autre taxi? Il fait beau, là, de toute manière. » Que je lui dis pour le taquiner un peu.

La question concernant Maddox me fit sourire doucement. Je savais que ça allait venir; mon père n'aimait pas Maddox et c'était sa façon à lui de me protéger. « Oh, je ne sais pas exactement, il m'avais parlé d'un truc avec sa famille d'accueil. » Que je laisse tomber comme ça. Je ne mentais pas réellement, parce qu'il avait des plans pour la fête de la plus jeune des enfants dans sa famille d'accueil. Je ne faisais qu'omettre certains détails sur la précision des informations que je détenais.
Il prend finalement ma main de sa main encore valide et on commença à marcher. Je n'aimais pas spécialement voir mon père dans cet état; d'habitude. Il avait l'air fatigué, et c'était probablement à cause de la blessure et de son repos forcé. « Ça va, très franchement. » Je réfléchis un peu trop longtemps à ce que je pourrais lui répondre. « Le, euh... Le professeur d'histoire à annulé son cours, cet après-midi, et j'avais sport juste après, du coup je me suis dit que ça ne serait pas dramatique si je le manquais... » Techniquement, la fin était vraie, mais j'avais menti concernant mon cours d'histoire. J'espérais que ça passe inaperçu. Je sais que mon père serait déçu d'apprendre que je séchais les cours. Parfois, je séchais des journées complètes, mais lui dire ça, ça serait de lui faire piquer une crise cardiaque.

Un simple accord de son côté me fit soupirer. Il semblait vouloir laisser le sujet de Maddox de côté, et j'arrêterais d'en parler avec plaisir. Ça ne faisait que me rappeler tout ce que je cachais à mon père et quand j'y pensais, la nervosité dans le creux de mon estomac me donnait l'impression d'être malade. « T'inquiète pas, je rate rarement les cours de sport... Ce sont les plus facile, de toute façon. » Que je ment. Certes, ils étaient faciles, mais justement, je me servais de cette excuse pour les sécher et partir faire des conneries avec mes potes. J'hausse les épaules doucement pour démontrer que ce n'était pas si grave que ça.
« Te fais pas mal. » Que je dis en le voyant grimacer de douleur. « Puis, bah... Je sais pas, la direction à pas l'air de vouloir faire quelque chose concernant le professeur... Dans tous les cas, ça m'arrange, parce que son cours est littéralement nul-à-chier. » Que je dis en mettant l'accent sur les trois dernier mots, et termine en rigolant doucement, serrant la main de mon père. je regarde partout, le soleil illuminant les rues, la faible brise rendant notre petite marche très agréable.

Je ne pouvais m'empêcher de rigoler de plus belle quand mon père me dit que les cours d'histoire, ce n'avait pas été sa tasse de thé non plus. Je tenais probablement ça de lui. « Oui, je sais, mais il y a quand même des façons plus intéressantes de faire passer le message! » que je m'exclame en levant ma main libre dans les airs de façon dramatique. Un silence confortable s'installa entre nous deux, et j'en profitai pour regarder les alentours. J'aimais bien être à l'extérieur, encore plus quand il faisait beau. Ça me donnait envie de ne plus jamais rentrer chez moi et de partir loin, pour découvrir plus de jolis endroits. Ça me donnerai aussi une bonne raison de sécher les cours pour toujours. Un faible sourire s'installa sur mes lèvres quand j'y pensai.

Mon père me tira de mes pensées, et je tournai la tête vers lui. « Tu veux parler de quoi? » Que je lui demande, une certaine nervosité s'installant en voyant la tête qu'il faisait. Il avait l'air contrarié, mais tentait de garder son sérieux. Je déglutis, me demandant de quoi il allait me parler.

Je marchais toujours aux côtés de mon père, ce dernier étant tombé dans un silence qui m'inquiétait un peu. Il avait ce petit sourire en coin qui tentait de m'apaiser, mais je savais ce qu'il voulait dire. J'appréhendais le pire. Lorsque la question tomba, je soufflai doucement, m'ayant attendue à pire. Quand même, sa question était profonde et existentielle, et pour tout avouer, je n'en avais aucune idée. Je ne répondis pas de suite, pour lui montrer que je réfléchissais à sa question. « J'en ai franchement aucune idée... » Que je commence, haussant les épaules, fixant au loin pour éviter de faire face à la potentielle déception de mon père. « J'ai toujours eu ce rêve de partir loin, tu vois, de découvrir un nouvel endroit, me faire de nouveaux potes, emmener Maddox avec moi et tout ça. » Je décide finalement de le regarder, une lueur dans mon regard témoignant du fait que voyager, c'était un rêve. « J'en parlais tout le temps à Elliott... Il voulait qu'on visite l'Irlande, tu sais. » Que je dis, une pointe de douleur et de nostalgie dans ma voix.

La réaction de mon père ressemble un peu à la mienne; il évite de croiser mon regard, parce que la mention du prénom de mon frère évoque encore des souvenirs qui s'avèrent trop frais, trop douloureux. Il ne répond que brièvement, comme s'il était en train de réfléchir à sa réponse. J'hochai la tête lentement quand mon père commença à parler, et plus il avançait dans son discours, plus ma nervosité augmentait, et je me pris à le regarder en tournant la tête vivement, haussant les sourcils. Il ne l'avait pas dit, mais le sous-entendait très clairement; il savait que le séchait les cours, que j'étais souvent absente, et c'est ce qu'il voulait dire quand il disait que je ne me donnais pas d'outils, pas de chance d'accomplir mon rêve. « Mais comment tu veux que je me donne des outils quand plus rien ne me motive! » Que je lâche, peut-être un peu trop agressivement. « Au moins si je pars, je peux repartir de zéro... Je l'apprendrai là-bas, la culture, la langue... On appelle ça de l'immersion! » Que je tente de défendre, retirant ma main de dans la sienne, fâchée, mais surtout contre moi-même, parce que je savais qu'il avait raison.

Je ne peux m'empêcher de ricaner de façon sarcastique à sa réponse. « C'était le truc d'Elliott, les langues. » Que je lance, presque comme un reproche, comme s'il était censé s'en souvenir. Moi, je m'en rappelait, parce qu'il venait étudier ses examens d'espagnol dans ma chambre et me faisais dire des insultes en espagnol. Je serrais les poings, les ramenant contre mon coeur, comme pour protéger le peu d'émotions que je pouvais ressentir face à la situation. Je me sentais coincée contre le mur, comme un chien en cage. Je sais que mon père ne voulait que le meilleur pour moi, mais ça ne faisait que me rappeler à quel point je n'avais aucun but dans la vie, et ça me faisait extrêmement peur. Je soupire bruyamment et secoue la tête pour enlever quelques mèches sauvages de devant mon visage. « J'aime bien la géo... » Que je murmure presque. Je crois que c'est tout. Mon cours de géographie avec Maddox est le seul qui me motive un tant sois peu. « Puis t'façon toi t'es allé dans l'armée, donc niveau cours t'as pas tellement de conseils à me donner. » Que je rétorque, décidée à garder mon pied sur les idées que j'ai. Je sais que je suis un peu effrontée de tenir tête à mon père comme ça, mais dans mon petit moment de panique, je ne m'en rend pas compte.

Je le sens, son regard. Il me brûle presque le côté du visage. C'est probablement son fameux regard réprobateur. Je le connais par coeur, et c'est pour ça que j'évite de le regarder, que je fixe tout droit où je vais, les sourcils froncés par la colère. Peut-être que j'y vais trop fort, à lui foutre ses choix de vie comme ça sous le nez, mais c'est tout ce qui sort; je laisse mes émotions parler. Je n'ai même pas le temps de placer un autre mot que je sens sa main sur mon épaule, me faisant pivoter de force. Il y est allé un peu durement, et je m'arrête de marcher, plongeant mon regard dans le sien, les lèvres serrées. Je ne savais pas quoi répondre, je ne voulais pas répondre, j'allais dire des conneries et je savais que ça ne mènerais à rien. Je baisse la tête et fixe le bout de mes chaussures lorsqu'il défait sa prise de sur mon épaule. « C'est... C'est juste débile. » Je frappe une roche du bout de mon soulier, cette dernière s'envolant et se répercutant contre le mur d'un immeuble. « J'ai que 17 ans, je pourrais faire ce que je veux de ma vie, mais le monde est tellement misérable que je suis forcée d'aller à l'école, me faire gaver de merde jusqu'à ce que je sois sur le marché du travail pour encore me faire gaver de merde par mes patrons... Pour vrai, à quoi ça sert de vivre, dans un monde comme ça? » Je termine en frappant à nouveau une roche, qui rebondit sur une poubelle, le son de la roche contre le métal résonnant dans la rue.

J'étais en colère; probablement juste un ramassis de frustration que je n'avais jamais réussi à faire évacuer. Je dois avouer que Maddox nourrissait cette frustration, mais peut-être involontairement, sachant que lui non plus ne savait que faire de sa vie mis à part foutre le feu aux poubelles. « Ça pue la merde, tu veux dire... » Que je répond à son petit discours. En fourrant les mains dans mes poches et secouant la tête, essayant d'assimiler l'information qu'il m'avait donné. Ça en faisait beaucoup pour une petite âme de 17 ans comme la mienne. J'essayai de me calmer en soupirant et tentai de détendre les épaules un peu.
J'allais dire autre chose quand mon père murmura qu'il fallait qu'on bouge. « Ok... » J’acquiesce en regardant derrière nous, intriguée quant à la raison de notre mise à route soudaine et un peu injustifiée. « T'as vu un fantôme, ou quoi? » Que je lui demande en tentant de rendre l'atmosphère plus légère. Je ne sais pas qui ou quoi il à vu, mais il est un peu tendu.

Mon père avait coupé court à notre discussion pour me dire que nous devions bouger, et très sincèrement, ça m'intriguais autant que ça m'inquiétais. Je n'arrêtai pas de regarder derrière moi alors que je suivais mon père sans broncher; je lui faisais confiance. Il n'était pas du genre à agir de la sorte pour rien, il était détective, après tout. Il répondit de façon un peu vague à ma question débile et je fronçai les sourcils, loin d'être satisfaite par sa répondre. « Ne pas traîner? Tu veux m'expliquer ce qui se passe ou bien on va continuer à fuir comme des rats? » J'hausse le ton un peu, mon inquiétude prenant un pic lorsque je le vois nous traîner dans une rue qui rallongeait la route pour retourner à la maison. Ce n'est pas par là que l'on passait, d'habitude, et je ne sais pas ce qu'il manigançait, mais j'agrippai son bras valide pour le forcer à s'arrêter. « Papa! Pourquoi on passe par là? » Que je lui demande en pointant la rue de ma main libre. Il allait devoir m'expliquer s'il voulait qu'on avance, parce que têtue comme je suis, je n'allais pas faire un pas de plus sans une bonne raison. C'était trop bizarre pour que je le suive comme un mouton.

J'étais vraiment confuse et n'étais pas certaine de comprendre pourquoi mon père voulait tant qu'on s'en aille aussi rapidement, et surtout pourquoi il nous faisait prendre un détour tandis que la route vers la maison ne prenait pas plus que 10 minutes à pied d'ici. Je tirai sur son bras valide et il s'arrêta, probablement parce que malgré le fait que j'ai essayé d'éviter de lui faire mal, sa blessure lui tirait quand même. Il m'expliqua qu'il avait vu une personne qui ne semblait pas vouloir devenir ami avec lui et qu'il était probablement en train de nous suivre. Je déglutis, loin d'être rassurée, mais hocha la tête et lâchai son bras, histoire qu'on puisse déguerpir d'ici rapidement. Maintenant que ses intentions étaient clair, je ne tenais pas spécialement à me faire attraper par un mec louche. « D'accord. » Est tout ce que je lui répondis, occupée à regarder les alentours pour voir si un taxi s'approchait. Je me mis sur le bord du trottoir et leva le bras en voyant un taxi vide arriver. « Taxi, ici! » Que je dis, plus à l'intention de mon père qu'à l'intention du conducteur de la bagnole jaune.