Détruire des souvenirs - HAILEY & GARRETT

La journée commençait du bon pied pour Garrett Carpenter qui se réveilla dans les bras d’une cliente un peu seul qui logeait au Vintage Hôtel pour la semaine. Fervent de femme et de sexe, l’homme ne pouvait en aucun cas refusé de passer une nuit avec une jolie demoiselle ; qu’il soit marié ou pas. Il s’en fichait bien, jamais Garrett n’avait été fidèle à l’une de ses femmes ; il en avait eu 5 et malgré son désir de se marier dès les débuts de ses liaisons, il se poussa dans diverses autres chambres sans attendre. Il était comme ça et il ne changerait pas. De toute manière, en ce moment, il continuait à perpétuer la tradition, il était toujours marié à la dernière Bree. Se rhabillant, l’homme quitta la chambre de la jolie rouquine, se rendant dans son bureau pour se changer. Il passa faire un tour par la petite salle de bain qui agençait son bureau ; se brossant les dents, passant un coup de peigne et un peu d’eau de Cologne. Garrett pouvait désormais se présenter à ses clients. L’homme s’occupa de quelques commandes avant de rejoindre l’air de rassemblement ; la grande réception où il pouvait voir quelques employés et quelques clients. Tout sourire, l’homme laissa briller sa blanche dentition, démontrant avec professionnalisme un certain respect pour sa clientèle.

Hailey ne travaillait pas aujourd'hui, mais il n'était pas question pour la demoiselle de rester bien tranquillement chez elle à ne rien faire. Elle avait l'intention d'aller jeter un coup d'oeil au Vintage Hotel. La belle n'avait jusque là pas eu le courage de se rendre à l'hôtel, car elle avait eu peur de voir ce que l'on avait fait de son lieu de recueillement. Avant, la jeune femme avait l'habitude de déposer de temps en temps quelques gerbes de fleurs, mais il n'y était plus retourné depuis que des travaux de rénovations avaient commencé. Elle voyait cet acte comme une sorte de profanation. Et cela l'avait mise dans une colère noire. Néanmoins, ce matin, la jeune femme avait trouvé la force de se rendre là-bas. Pour voir ce qu'on avait fait de l'ancien asile.

Comme elle savait que le Vintage était un hôtel de luxe, Hailey s'était vêtu de sa plus belle robe et s'était coiffée puis maquillé. Après quelques minutes de transport, la jeune femme était enfin arrivée à destination. Elle respira profondément et trouva le courage d'entrer. Une fois à l'intérieur, la jeune femme avança doucement jusqu'au hall central. Elle était intimidée et perdue. Où étaient les chambres des patients? L'odeur typique des produits antiseptiques? Les fous qui déambulaient sans but dans les couloirs tristes et blancs?

"C'est vraiment d'un très mauvais goût...goûts de chiottes..."

Hailey ne put s'empêcher de critiquer les lieux. C'était en réalité vraiment beau mais la demoiselle était encore trop blessée pour faire preuve de bonne foi. Malheureusement, elle ne s'était pas rendu compte qu'elle était juste à côté du propriétaire des lieux.

Jouissant du parfum de rose qui trainait dans la pièce principale et du charme des lieux, Garrett Carpenter ne pouvait qu’être fier de son hôtel. Ses rêves s’étaient réalisés et aujourd’hui, il était le PDG des lieux, étant même le patron du reste de sa famille. Oui, Constance, Dayton et Kayle étaient actionnaires et géraient le Vintage, mais c’est Garrett qui avait le titre de PDG ainsi que toutes les responsabilités jointent. Lorsqu’il entendit un commentaire déplacé parmi les regards souriants et les bavardages des clients, le patron tourna la tête furtivement, changeant complètement de regard. Ayant arrêté de sourire subitement, Garrett fixa autour de lui les gens offusqués, voyant qu’une jeune demoiselle en robe à ses côtés semblait être à l’origine de cette réplique cinglante. Carpenter serra les dents et reprit son souffle un moment avant de lui répondre sèchement. Goût de chiotte ? Qu’est-ce qui vous fait penser ça ma p’tite dame ? Dit-il d’une pointe d’arrogance mêler de sarcasme. J’espère que vous parlez du bonbon à la menthe que vous venez de manger, parce que j’ai bien de la difficulté à comprendre vos impressions…. Avoua le propriétaire sous le choc. Il fixa la brunette en attendant une réponse cohérente de sa part.

Hailey aurait voulu être plus discrète et ne pas avoir été entendu si rapidement mais qu'importe. Son interlocuteur semblait avoir été choqué par ses propos? Très bien, de toute manière, la jeune femme n'était pas ici pour jouer les hypocrites et faire des ronds de jambes.

"Non je faisais bien référence à la décoration de ces lieux."

Elle regarda l'inconnu droit dans les yeux puis ajouta:

"Cet endroit est un temple au mauvais goût et à l'étalage du vulgaire. C'est une insulte à notre ville."

Ses grands yeux bleus maquillés sobrement scrutaient la moindre parcelle du grand hall. Elle superposait ce qu'elle voyait à l'ancien asile qu'elle connaissait si bien. Est-ce que les architectes et les ouvriers du bâtiment avaient eu la moindre pensée pour ceux qui étaient morts ici? Il n'y avait qu'un vulgaire étalage de richesses, c'était bien tout le contraire de l'esprit qui régnait dans cette ville. Les gens, même les plus aisés, étaient plutôt simples, de plus ce nouvel hôtel amenait tous pleins de gens tous plus idiots les uns que les autres...qui venaient avec leurs gros sabots comme s'ils étaient en terrain conquis.

"Les morts doivent se retourner dans leur tombe..."

Murmura la jeune femme.

De tomber face à une greluche de ce genre laissa Garrett refroidie. Il savait très bien qu’en tant que propriétaire et président de l’établissement – fortement gratifié jusqu’à présent – il ne pouvait pas se permettre des scandales ; encore moins sous son toit. Cette ingrate cliente semblait vouloir détruire ce qu’il construisait depuis un mois désormais ; il ne pouvait pas la laisser faire. Sachant que le Vintage était ouvert depuis à peine plus d’une semaine et que plusieurs de ses clients trainaient autour d’eux, pouvant parfaitement entendre les commentaires que Carpenter avait lui-même perçus. Vous êtes qui pour pouvoir critiquer la restauration des lieux ? Je présume que vous n’avez aucune connaissance en rénovation et décoration, alors sur quels points vous appuyez-vous pour critiquer ainsi mes réalisations ? Provoqua-t-il la femme de la manière la plus professionnelle possible. Garrett baignait toujours dans les premières impressions et sa réputation ne semblait toujours pas gagné, il devait faire gaffe. Je suis certain que les habitants de cette ville sont enthousiasmés à l’idée de voir cet horrible bâtiment complètement transformé. Avant notre acquisition des lieux, c’était un endroit dangereux, l’état des lieux était pitoyable ; je pense que ça ne peut qu’aider ses habitants à tourner la page enfin ! L’homme espérait calmer un peu les frustrations de la demoiselle.

Hailey plissa un peu les yeux lorsque l'homme en face d'elle tenta de la déstabiliser. Il avait bien choisit sa tactique pour ne pas perdre la face devant la jeune femme. Noyer l'interlocutrice de langage technique était loin d'être idiot. D'autant plus que la belle n'y connaissait strictement rien à l'architecture. Elle connaissait peut-être quelques artistes comme John Utzon, Gaudi etc cependant, elle savait tout de même reconnaître quelque chose de beau ou non. Et puis de toute manière, Hailey resterait butée sur ses positions. Quand elle avait une idée en tête, il n'y avait pas moyen de lui faire changer d'avis. Même si elle avait complètement tord.

"Vous avez raison, je n'ai aucune connaissances en architecture etc etc mais avouez qu'il n'y a pas besoin d'être architecte pour voir que ce que vous avez rénové est une complète faute de goût."

Insolente petite gamine. Oui oui, elle l'était. Hailey n'éprouvait aucune once de respect pour ce type. Il avait piétiné ses souvenirs, craché sur son deuil inachevé au nom du profit. La jeune femme était outrée par les paroles du maître des lieux. Elle leva le menton, fière et forte:

"Cet horrible bâtiment comme vous le qualifiez...avait une histoire! Des gens sont morts ici et vous qu'est-ce que vous faites? Sans le moindre respect vous balayez d'un revers de main tous ces souvenirs...au nom de votre propre profit personnel. Et n'allez pas m'endormir avec vos -faut tourner la page- Vous avez vu une opportunité de vous faire un peu plus d'argent et vous l'avez saisit, sans penser à tout ce qu'il y avait autour."

Sa voix tremblait légèrement de rage cependant, elle essayait de se maîtriser pour rester la plus discrète possible.

Garrett rageait intérieurement, il ne pouvait pas se permettre de démontrer cette rage au grand jour devant tous sa clientèle. L’homme connaissait les petites villes, il savait que tout se savait rapidement et que sa réputation lui collerait au cul bien rapidement. Le PDG grinça des dents face aux commentaires désobligeants de la jeune femme. Il devait se défendre, sans trop pousser. Vous venez critiquer les lieux uniquement pour votre grand plaisir mademoiselle, je ne vois pas en quoi vos remarques pourraient nous affecter, nous sommes un établissement luxueux et c’est clairement hors de votre style de vie, alors n’essayez pas de venir jouer les petites princesses obstinées avec moi… je vous conseille de retourner trainer dans vos bas quartiers avec tous les drogués dans votre genre. Suggéra l’homme sèchement. Il poussait un peu le bouchon, mais Carpenter n’arrivait plus à tolérer l’ingratitude de cette fille. De toute manière, si nous n’aurions pas acheter, c’est une autre entreprise qui aurait complètement radiés le bâtiment, alors comptez-vous chanceuse de pouvoir continuer à venir… même si votre présence au Vintage n’est plus très conviée…. Garrett serrait le point discrètement pour relâcher sa colère et tenter de reprendre le dessus.

Hailey foudroya le gérant du regard. Pour elle, il était l'ennemi à abattre, le cheveux sur la soupe, le cancer de cette ville. Sidebay était pour elle, une ville qui n'avait pas beaucoup souffert de la crise économique, qui continuait à prospérer grâce à ses commerces et aux vacanciers. Cependant, avec l'ouverture de cet hôtel, il y avait fort à parier que la fréquentation de l'île allait exploser. Elle voyait déjà sa vie paisible être perturbée par les masses qui allaient venir.

"Droguée? Votre argumentation laisse franchement à désirer...mais cela n'a rien d'étonnant, l'état des lieux reflète votre état d'esprit."

Puis elle fit un pas en arrière, ainsi qu'un autre. Il était temps pour elle de faire demi tour et de partir la tête haute.

"Comptez sur moi pour vous faire une bonne réputation. De toute façon, votre affaire est vouée à ne fonctionner qu'un temps. Il y a eu tellement de morts et de souffrances ici à cause des âmes torturés des malades, que ça a forcément laissé des traces. Et ce n'est pas une rénovation qui va changer cela."

Il ne comprenait pas? Il ne la croyait pas? La prendrait pour une folle? Tant pis pour lui. Mais Hailey était très superstitieuse et elle était persuadé que le malheur était capable d'imprégner les lieux.

"Sur ce, je vous souhaite une bonne fin de journée."

C'était bien entendu hypocrite. Mais aussi peste fut-elle, elle n'allait pas s'abaisser au niveau de l'homme en face d'elle. La tête haute, elle quitta l'hôtel en se jurant de pourrir la vie de ce type.

Garrett Carpenter n’aurait pas imaginé que la réouverture de l’établissement réussirait à créer ce genre de haine auprès des habitants de Sidebay. Oui, déjà là, il y avait des représailles des adolescents rebelles qui vandalisaient certaines parties de l’hôtel le soir venu, mais de venir l’insulter de la sorte dans une tenue pareil, Wade se méprenait de la colère de cette femme. « Vos paroles ne me touchent en aucun cas mademoiselle. Si vous croyez aux malédictions et aux histoires de fantômes, c’est votre choix, mais je trouve votre comportement irrespectueux. Dites ce que vous voulez aux habitants de cette ville, mais je crains que votre opinion ne compte pas pour beaucoup. » La femme quitta les lieux de manière à énerver Garrett pour le reste de la journée. « Bonne journée mademoiselle. » Répliqua-t-il sévèrement avant de tourner les talons, adressant de petits sourires maladroits aux clients et au personnels qu’il croisa avant de retourner dans son bureau pour se détendre.

TERMINÉ & VERROUILLÉ